C’est l’un des grands atouts de l’assurance vie, le capital épargné est accessible sur toute la durée de vie du contrat, de manière totale ou partielle.
Chaque sortie d’épargne est appelée « rachat ». Mais attention, à chaque rachat, partiel ou total, qui provoquerait alors le dénouement du contrat, la fiscalité s’applique. Intéressons-nous donc à la façon dont elle vient s’imposer sur l’assurance vie.
Mieux comprendre le fonctionnement de l’assurance vie
Sachez d’abord que, contrairement au Plan Epargne Retraite, les versements sur l’assurance vie ne sont pas défiscalisables à l’entrée. En revanche, l’assurance vie reste un produit de défiscalisation. C’est donc lors des rachats que tout se joue. Rassurez-vous, le capital correspondant à l’épargne versée par l’assuré reste exonéré de tout impôt. C’est donc sur la part d’intérêts et de plus-values réalisés, soit dit encore sur les gains réels engendrés, que la fiscalité pointera son nez.
Pour rappel rapide : oui, l’assurance vie génère des intérêts ou des plus-values. C’est un contrat de placement d’épargne à moyen ou long terme, qui consiste pour le souscripteur à placer son argent de manière régulière ou non auprès du gestionnaire. L’assureur du contrat va alors placer l’épargne sur des supports qui pourront être plus ou moins rémunérateurs, selon qu’il s’agisse d’un contrat monosupport, ou multisupport :
- Le contrat monosupport, constitué uniquement de placements en fonds euros. Il s’agit de produits sans risque de perte en capital, qui se concentrent essentiellement sur des obligations d’Etat. Ce dernier émet un titre de créance, et l’épargnant investisseur devient alors créancier de l’Etat. Il se rémunère par le taux de l’emprunt, dont les intérêts sont versés annuellement et définitivement acquis. C’est ce que l’on appelle « l’effet cliquet » ;
- Le contrat multisupports, constitué pour partie de ces mêmes fonds euros, mais aussi et principalement de produits liés à la bourse que l’on appellera unités de compte (UC). Celles-ci sont investies sur les marchés financiers. Le capital n’est alors pas garanti puisque la valeur des unités de compte variera selon les fluctuations du marché, mais ces placements peuvent être bien plus rémunérateurs, à la condition de faire les bons choix, et de préférer miser sur le long terme.
Vous l’aurez donc compris, en fin de contrat, l’assureur s’engage à reverser l’argent épargné sous forme de rente ou de capital, à l’assuré de son vivant, ou à ses bénéficiaires en cas de décès, augmenté des gains réalisés et diminué des frais de dossier et de gestion. C’est alors que l’assuré pourra récupérer l’épargne placée, les intérêts des placements sur fonds euros, et les plus-values générées sur les unités de compte.
Quelle est la fiscalité appliquée à l’assurance vie ?
La fiscalité intervient donc dès lors que l’assuré procède à des rachats, qu’ils soient partiels, ou qu’ils provoquent le dénouement du contrat. Parce que rien n’est jamais si simple dans le milieu de la finance, plusieurs phénomènes vont impacter la fiscalité appliquée, et notamment les deux suivants : la date des versements, et l’âge du contrat.
La fiscalité de l’assurance vie selon la date des versements effectués
D’abord, la date de versement des fonds sur l’assurance vie sera à prendre en compte. Vous l’aurez compris, chaque euro versé est comme « compartimenté », ce que l’on retrouve en sortie d’épargne. Trois périodes sont donc clairement définies, chacune se voyant appliquer une fiscalité différente :
- Les gains réalisés des versements effectués avant le 31 décembre 1997 sont totalement exonérés d’impôt. Aucune conséquence donc à retirer son capital;
- Les gains réalisés des versements effectués entre le 1er janvier 1998 et le 26 septembre 2017 sont, par principe, soumis au barème de l’impôt sur le revenu, mais l’épargnant peut préférer opter pour le PFL;
- Les bénéfices réalisés des versements effectués après le 26 septembre 2017 voient s’appliquer par défaut le PFU, imposé à 12,8 %, ou bien l’imposition à l’impôt sur le revenu, sur le barème progressif correspondant à l’assiette assujettie.
Question légitime qui nous arrive aux lèvres : pourquoi ces échéances, et notamment pourquoi celle de 2017 ? Et bien c’est la mise en place du PFU qui est venu largement impacter la fiscalité de l’assurance vie, dans un objectif de simplification administrative. Pour mieux comprendre, expliquons chacun des sigles précités :
- L’impôt sur le revenu (IR) : Evidemment bien connu, c’est l’impôt direct de référence pour l’ensemble des contribuables. Il existe depuis 1914, et porte sur les revenus salariés, financiers, fonciers, etc. Il est fixé selon un barème dit progressif, par tranches de revenus, pouvant aller de 0, 11, 30, 40, et jusqu’à 45 % d’imposition;
- Le Prélèvement Forfaitaire Libératoire (PFL): Utilisé principalement pour s’acquitter d’une contribution fiscale sur des revenus du patrimoine, le PFL est fixe, à la différence de l’impôt sur le revenu qui est établi selon un barème progressif. Il est proposé en alternative à l’impôt sur le revenu, et choisi si le calcul de la fiscalité est plus favorable à l’épargnant;
- Le Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU): Il a été mis en place par la loi de finances de 2018, et s’applique donc sur les revenus du capital, dont les rachats d’assurance-vie, effectués depuis le 1er janvier 2018. Egalement appelé « flat tax », le PFU est un impôt à taux unique, contrairement à l’impôt sur le revenu qui est progressif. La différence avec le PFL est qu’il inclut les prélèvements sociaux, d’où son taux à 30 %, bien plus élevé que le PFL;
- Le Prélèvement Forfaitaire Obligatoire (PFO) : Il forme le PFU aux côtés des prélèvements sociaux. Le PFU est au taux de 30 %, car il inclut 12,8 % de PFO (impôt forfaitaire), et 17,2 % de prélèvements sociaux. En clair : PFU = PFO + PS;
- Les prélèvements sociaux (PS) : Aussi appelés « Contributions sociales sur les revenus du capital » (CSRC), les prélèvements sociaux forment un ensemble de cotisations obligatoires auxquelles sont soumis les revenus du patrimoine et de placement. Depuis 2018, les prélèvements sociaux sont prélevés au taux de 17,2 %, qui comprend 9,2 % de CSG (Contribution Sociale Généralisée), 0,5 % de CRDS (Contribution au Remboursement de la Dette Sociale), et 7,5 % de prélèvement de solidarité.
La fiscalité de l’assurance vie selon l’âge du contrat
On vous avait prévenu, les choses se corsent. En réalité, c’est toujours cette fameuse échéance du 26 septembre 2017 qui revient impacter la fiscalité appliquée, cette fois-ci selon l’âge du contrat.
Les rachats effectués entre le 1er janvier 1998 et le 26 septembre 2017 :
- Si le contrat est ouvert depuis moins de 4 ans au moment du rachat, alors les plus-values seront imposées à hauteur de 35 % du PFL, ou bien à l’impôt sur le revenu, selon ce qui sera le plus avantageux pour l’assuré, ainsi qu’à 17,2 % de prélèvements sociaux;
- Si le contrat est ouvert depuis 4 à 8 ans au moment du rachat, alors les plus-values seront imposées à hauteur de 15 % du PFL, ou bien à l’impôt sur le revenu, selon ce qui sera le plus avantageux pour l’assuré, ainsi qu’à 17,2 % de prélèvements sociaux;
- Si le contrat est ouvert depuis plus de 8 ans au moment du rachat, alors les plus-values seront imposées à hauteur de 7,5 % du PFL, ou bien à l’impôt sur le revenu, selon ce qui sera le plus avantageux pour l’assuré, ainsi qu’à 17,2 % de prélèvements sociaux.
En clair, le prélèvement forfaitaire libératoire sera dégressif après 4 ans, et après 8 ans. Idéalement, mieux vaudra donc ne pas effectuer de retrait avant 8 ans.
Les rachats effectués depuis le 27 septembre 2017 :
- Si le contrat est ouvert depuis moins de 8 ans au moment du rachat, alors les plus-values seront imposées à hauteur de 30 % du PFU, intégrant déjà les 17,2 % de prélèvements sociaux, ou bien à l’impôt sur le revenu ainsi qu’à 17,2 % de prélèvements sociaux, si ce second choix est plus avantageux pour l’assuré;
- Si le contrat est ouvert depuis plus de 8 ans au moment du rachat, alors les plus-values seront imposées à hauteur de 7,5 % de PFO jusqu’à 150 000 €, puis à hauteur de 12,8 % pour les plus-values allant au-delà, donc sans prélèvements sociaux, ou bien à l’impôt sur le revenu ainsi qu’à 17,2 % de prélèvements sociaux, si ce second choix est plus avantageux pour l’assuré.
Ajoutons qu’à cette fiscalité annoncée, un abattement annuel global de 4 600 € pour une personne seule, et de 9 200 € pour un couple, sera systématiquement appliqué sur les contrats de plus de 8 ans. Cela signifie donc qu’en conservant son contrat au moins 8 ans, la fiscalité est largement allégée, tout en ayant réalisé de potentielles belles plus-values.
La fiscalité de l’assurance vie en cas de décès de l’assuré
Malheureusement, nul ne peut prédire de quoi sera fait demain, et il se peut que l’assuré décède avant le terme de son contrat d’assurance vie. Ce type de contrat est conçu pour anticiper la transmission de son patrimoine financier, puisqu’il peut s’extraire de la succession. C’est pourquoi la fiscalité appliquée à l’assurance vie rencontre encore une particularité ici, et à son habitude, le mode d’application est plutôt complexe. Ici, c’est l’âge de l’assuré au moment des versements qui sera le facteur déterminant, ou plus exactement le fait de savoir si l’assuré a effectué les versements avant ou après son 70ème anniversaire :
- La sortie de capital concernant des versements réalisés avant les 70 ans de l’assuré est exonérée d’impôt pour le bénéficiaire, dans la limite de 152 500 € par tête. Au-delà, elle sera imposée à hauteur de 20 %, puis de 31,25 % à partir de 852 500 €, qu’il s’agisse des versements ou des intérêts et plus-values réalisés ;
- La sortie de capital concernant des versements réalisés après les 70 ans de l’assuré voit s’appliquer des droits de succession, après un abattement forfaitaire de 30 500 € commun à l’ensemble des bénéficiaires. S’ils sont deux, chacun bénéficiera d’un abattement forfaitaire de 15 250 €. En revanche, les intérêts et plus-values générés sont exonérés de droits de succession.
Mais attention, n’arrêtons pas là les réjouissances de la fiscalité de l’assurance vie après le décès de l’assuré. Nous le disions, les versements effectués après 70 ans seront inscrits dans la succession de l’assuré. La règle de la succession veut qu’un abattement de 100 000 € soit appliqué aux enfants héritiers. C’est une règle classique et universelle prévue par les droits successoraux. Cela signifie qu’un enfant bénéficiaire pourrait profiter d’un abattement de 30 500 €, cumulé à un abattement de 100 000 €, avant d’être imposé dans le cadre des droits de succession. Après abattement, la fiscalité imposée sur les droits de succession sur les enfants héritiers est progressive. Voici quelques exemples des taux applicables :
- Jusqu’à 8 072 € : imposition à 5 %,
- De 8 073 à 12 109 € : imposition à 10 %,
- De 12 110 à 15 932 € : imposition à 15 %,
- De 15 933 à 552 324 : imposition à 20 %,
- De 552 325 à 902 838 € : imposition à 30 %,
- De 902 839 à 1 805 677 € : imposition à 40 %,
- Plus de 1 805 677 € : imposition à 45 %.
Que peut-on en déduire ? Que les versements effectués avant les 70 ans de l’assuré ne seront pas nécessairement moins imposés que les autres, surtout si l’assuré déclare ses héritiers comme bénéficiaires. Ajoutons qu’en ce qui concerne le conjoint survivant, marié ou pacsé, il sera exonéré de droits de succession sur l’ensemble du capital qui lui reviendra, quel que soit l’âge de l’assuré au moment des versements. Il en sera de même pour les frères et sœurs du défunt, à la triple condition qu’ils soient célibataires, âgés de plus de 50 ans ou invalides, et ayant résidé avec le défunt durant les 5 années précédant son décès.
Quels sont les avantages et inconvénients de la fiscalité de l’assurance vie ?
Les avantages de l’assurance vie en termes de fiscalité sont évidemment plutôt intéressants :
- Profiter d’un taux d’imposition plus faible après 8 ans : L’assurance vie est un produit d’épargne à moyen ou long terme. Aussi, passé 8 années d’épargne, la fiscalité diminue pour inciter les épargnants investisseurs à faire tourner l’économie financée par l’épargne privée;
- Transmettre un patrimoine exclu de la succession : Les abattements dont les bénéficiaires peuvent profiter leur permet d’hériter d’un capital qui sort de la succession, avec une fiscalité parfois nulle, ou très légère;
- La défiscalisation en cas de difficulté majeure : Nous ne l’avons pas mentionné plus haut, mais si l’assuré rencontre un aléa de la vie venant largement impacter son quotidien et ses finances, il pourra alors récupérer son épargne placée tout en restant parfaitement exonéré d’imposition. Les aléas concernés sont les suivants : licenciement, mise à la retraite anticipée, cessation d’activité non salariée suite à un jugement de liquidation judiciaire, invalidité correspondant au classement dans les 2èmes et 3èmes catégories de la Sécurité sociale.
A l’inverse, nous pouvons lui reprocher des versements non défiscalisables à l’entrée, comme ils pourraient l’être en revanche sur le Plan Epargne Retraite. L’assurance vie ne permet donc pas la défiscalisation à l’entrée, pourtant là où elle serait probablement nécessaire. On peut supposer que lorsqu’un assuré dispose de finances suffisantes pour épargner, c’est qu’il perçoit des revenus confortables, donc qu’il est potentiellement imposable.
Ajoutons également comme inconvénient la fiscalité des rachats de moins de 8 ans. Si elle est moindre après 8 ans de détention du contrat, elle est en revanche plutôt importante pour les retraits en amont des 8 ans. Pourtant, dans une vie d’actif, les finances aisées d’aujourd’hui ne prévalent pas des finances de demain, sans parler des changements de vie (séparation ou divorce, veuvage, perte d’emploi, etc.) qui peuvent largement chambouler les finances et nécessiter le retrait de l’épargne.